Réglementation Freinage : comment négocier le virage du système à double ligne ?

Le couperet est tombé ! Depuis le 1^er janvier 2025, tous les véhicules remorqués neufs ont l’obligation d’être dotés d’un système de freinage à double ligne, pneumatique ou hydraulique. Une exigence déjà appliquée depuis 2018 aux tracteurs, qui pouvaient toutefois conserver une simple ligne hydraulique en parallèle. Mais depuis le 1^er janvier, cette dernière n’est plus disponible sur les tracteurs neufs. Cette évolution réglementaire, annoncée de longue date, a été plus ou moins anticipée par les utilisateurs. Dans tous les cas, ces derniers doivent trouver des solutions pour gérer au mieux la cohabitation de matériels de différentes générations ces prochaines années.

Le choix de la technologie de freinage – pneumatique ou hydraulique – lors de l’achat de nouveaux matériels tractés est le premier point à trancher pour simplifier sa réflexion. Si l’on s’en tient à l’offre des constructeurs en ce début d’année, le freinage pneumatique apparaît comme le choix de raison. En effet, bon nombre d’entre eux, spécialement les marques étrangères à la stature internationale, proposent cette unique solution éprouvée depuis de nombreuses années. De développement plus récent, le freinage à double ligne hydraulique peine à se déployer, y compris chez les constructeurs tricolores. Il n’offre un réel avantage que pour de petits matériels, grâce à ses composants compacts plus faciles à intégrer que ceux d’un freinage pneumatique. La connexion à double ligne hydraulique est d’ailleurs la seule possibilité sur de nombreux tracteurs spécialisés. Hormis dans les secteurs utilisant des machines de faible gabarit, comme la viticulture ou les petites exploitations d’élevage, le freinage pneumatique a donc, pour l’instant, une longueur d’avance.

Le freinage à double ligne hydraulique intelligent conservé

Cette situation d’incertitude sera plus facile à résoudre lors d’un prochain achat de tracteur neuf. Même si cela représente un surcoût, il sera en effet préférable de l’équiper des deux technologies de freinage à double ligne, sauf si vous êtes certains de n’utiliser que l’une ou l’autre. Le double équipement permet, d’une part, de ne pas se fermer de portes pour de futures acquisitions de véhicules tractés. Le freinage à double ligne hydraulique dit « intelligent », d’autre part, devrait toujours pouvoir piloter le système à simple ligne de vos outils existants. Avec la généralisation du freinage à double ligne, cette solution intelligente ne devait pas perdurer après le 1^er janvier 2025. Mais le Cema a obtenu auprès de la Commission européenne une prolongation de son utilisation. « Nous attendons encore la parution de l’amendement qui le validera, confirme Guillaume Bocquet, directeur des affaires réglementaires d’Axema, le syndicat rassemblant les industriels français de l’agroéquipement. Cette décision est rassurante pour la sécurité des utilisateurs, car on ne peut pas prendre le risque de voir des véhicules non freinés derrière des tracteurs neufs ! »

Monter un kit de freinage pneumatique

L’équation se complique pour les tracteurs existants. Les modèles immatriculés avant le 1^er janvier 2018 sont rarement équipés d’un freinage à double ligne. Ainsi, à l’exception des quelques cas qui en étaient déjà dotés, leur rééquipement ne peut se faire qu’en pneumatique. Le montage avec une solution d’usine est d’autant plus aisé pour les modèles qui avaient été homologués à l’époque en freinage pneumatique. À partir de 2018, tous les tracteurs disposent obligatoirement d’une solution de freinage à double ligne. Les deux technologies, pneumatique et hydraulique, ont plus ou moins été mises en avant par les tractoristes. Certains ont rendu obligatoire le pneumatique sur la majorité des modèles de leurs gammes, réservant l’hydraulique aux tracteurs très compacts, notamment les spécialisés. D’autres ont laissé davantage le choix à leurs clients, en particulier sur les puissances intermédiaires de 100 à 150 ch. Bon nombre d’agriculteurs ont ainsi préféré faire le choix de l’hydraulique, qu’ils connaissent bien, et s’éviter le surcoût lié au pneumatique. S’il est techniquement assez simple d’équiper les tracteurs d’avant 2018 montés en simple ligne hydraulique d’un kit de freinage pneumatique, comme le confient tractoristes et spécialistes de la seconde monte, la tâche se complique pour les modèles dotés d’une double ligne hydraulique pour lesquels le double équipement n’avait pas été prévu. Plusieurs tractoristes avouent ne pas avoir de solutions pour ce type de montage, du fait notamment d’un problème d’encombrement.

Et même dans les situations ne présentant aucune incompatibilité technique, les contraintes administratives apparaissent pour l’instant dissuasives. « Le montage d’un kit de freinage est soumis à une réhomologation pour être dans les règles, confirme Guillaume Bocquet. Or cela impose de demander une réception à titre isolé auprès d’une Dreal [direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement], qui peut s’avérer très lourde, administrativement parlant. La procédure est toutefois censée être plus rapide pour des tracteurs homologués dès l’origine pour le freinage double ligne. D’autant plus en ayant recours à un kit de freinage pneumatique validé par le tractoriste. »

Du retard à l’allumage dans les Dreal

Mais, sur le terrain, les choses ne se passent pas, pour l’instant, comme prévu. Plusieurs tractoristes nous confient faire face à un blocage administratif de la part des Dreal, y compris pour un montage avec des composants d’origine sur des tracteurs récents. « Les Dreal ne semblent pas avoir de directives suffisamment claires pour faire avancer les dossiers, confirme Hans Van de Blankevoort, directeur de la société HB qui commercialise les kits de freinage pneumatique Atzlinger. En attendant que les choses s’éclaircissent d’un point de vue administratif, nous ne pouvons que conseiller aux agriculteurs de veiller à ce que leur concessionnaire assure un montage en bonne et due forme. Si le kit dispose d’un certificat de conformité délivré par le constructeur et que le concessionnaire respecte le protocole en consignant la notice de fin de montage, l’agriculteur aura la preuve que le système de freinage double ligne de son tracteur respecte la réglementation. »

La balle est ainsi dans le camp des services de l’État pour débloquer la situation. Ce serait très regrettable de laisser bon nombre d’agriculteurs sans solution, au risque de voir rouler des convois sans freinage de remorque ou avec un tracteur rééquipé non homologué et donc théoriquement non assurable.